Le Linceul sauvé des flammes
Récit de Mario Trematore, pompier professionnel.
"Tout a commencé le 12 avril 1997 à dix heures du soir. Je n'étais pas de
service ce jour-là et j'étais chez moi. Voyant de la fumée j'ai pensé aussitôt
qu'il y avait un incendie quelque part. J'interrogeai les gens. J'appris que la
chapelle Guarini était en feu et j'en fus vivement affecté, non à cause du Linceul
que je ne connaissais guère et que je croyais d'ailleurs faux selon ce que j'avais
lu, mais à cause de la chapelle Guarini que j'aimais beaucoup et que je considérais
comme un chef-d'oeuvre d'architecture (Trematore a fait des
études d'architecte). Je mis mon uniforme, pris mon équipement pour
aller prêter main-forte à mes collègues.
Bien que ce ne soit pas mon service,
je mis mon uniforme et pris mon équipement pour aller prêter main
forte aux collègues. J'arrivai à onze heures du soir. Il faisait nuit,
mais l'incendie faisait rage et on y voyait comme en plein jour. Déjà la coupole
s'effondrait, des poutres enflammées et de grands blocs de marbre noir tombaient
tout autour de nous, chacun capable de tuer un homme. Je n'avais jamais vu un
tel incendie, et j'eus le sentiment que le démon était à l'oeuvre. J'avais très
peur : je pensais que si j'y allais, j'allais mourir et pensais à ma femme et
à mes enfants. Je regrettais d'être venu surtout que rien ne m'y obligeait, le
Linceul ne m'intéressait pas et j'étais surtout venu dans le but d'aider mes camarades.
C'est alors que j'entendis une voix qui se mit à me donner des ordres, une voix
énergique qui résonnait au-dedans de moi et que personne d'autre n'entendait.
Elle me disait : " tu dois sauver le Linceul ". Je me suis approché
du coffre dans lequel il était enfermé. C'était un coffre métallique recouvert
d'un verre très épais (quelque 6 cm d'épaisseur) que personne ne pouvait ouvrir.
Notre équipement comprenait des pinces et des tenailles qui permettaient de sectionner
les canalisations, mais qui dans le cas présent étaient inefficaces. La voix me
dit alors : " il te faut un marteau ". Je ne sais pas pourquoi mais je
me suis dit que le marteau était le seul instrument adéquat parce qu'il avait
déjà été associé au Christ au moment de sa Passion. J'ai demandé à un camarade
d'aller me chercher un marteau. Me l'ayant apporté je me mis à frapper
de toutes mes forces. J'ai frappé longtemps, longtemps, je ne sais combien
de coups mais sans résultat, le verre ne cédait pas.
Mes collègues
m'adjuraient de sortir car le toit menaçait de s'effondrer quand j'entendis
lLa voix me dire " frappe de côté ". Je frappai et le verre céda. Je saisis
le coffre dans mes bras et j'eus la surprise de le trouver léger, très léger.
Moi aussi j'étais devenu léger je marchais sans toucher terre, ma crainte avait
disparu et j'étais transporté de joie, d'une joie qui n'est pas de ce monde. Je
sortais ainsi le coffre tandis que la chapelle s'effondrait et que des blocs brûlants
tombaient tout autour de moi, mais je me savais invulnérable. Je me suis dirigé
en courant vers la sortie et entendis alors les pleurs d'un petit enfant. Je me
suis arrêtéi et regardant autour de moi je ne vis aucun enfant. Les pleurs
venaient de l'intérieur du Linceul... Arrivé en haut des marches de la
chapelle, il y avait bien cinq mille personnes sur la place qui, heureuses de
voir que j'avais sauvé le Linceul, m'ovationnaient. C'est du moins ce qu'on m'a
dit plus tard car je ne voyais rien, n'entendais rien, sauf ces pleurs d'enfant
qui venaient du Linceul, et m'effondrais sans connaissance au bas des marches.
On me transporta à l'hôpital où je suis resté plus d'une semaine.
Le
bras qui avait frappé le coffre du Linceul me fit souffrir très longtemps mais
j'avais reçu une grâce insigne : celle d'aimer la Relique plus que tout au monde,
et de la faire connaître à tous.
Lorsque les ingénieurs de la société qui avait fabriqué le reliquaire de protection du Linceul en verre blindé de plusieurs épaisseurs apprirent par les médias qu'un pompier avait réussi à le détruire à coups de marteau, ils ne crurent pas à cette nouvelle. En effet, ils l'avaient conçu pour résister à toutes tentatives de destruction avec, à l'appui, des expérimentations concluantes dans leur laboratoire ; ce n'était donc pas possible, la presse devait transmettre une information erronée. Lorsque cela fut confirmé par les autorités, ce fut la consternation : comment cela avait-il pu être possible ? Ils ne trouvèrent aucune explication et continuent d'affirmer que la destruction du reliquaire ne pouvait pas être la conséquence des coups reçus et encore moins du dernier coup porté sur le côté ! "